J'ai hésité à mettre ce C.D.G.* de mon ami z'Hubert Le z'Hibou.
reconnaissons qu'il se calme depuis qu'il fréquente les z'humains.
*Coup De Gueule.
Réflexions et relecture faites... le C.D.G. viendrait plutôt du Papou.
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-Que lis-tu ? z’Hubert me regarde avec ses deux grands yeux prédateurs et, en cet instant, quémandeurs.
-Le dernier Goncourt.
-C’est quoi ?
-« Au-revoir là-haut » de Pierre Lemaitre*.
-Ça parle de quoi ?
-De la fin et des suites de la première guerre mondiale.
-Pourquoi tu lis ça ? Tu n’aimes pas les prix littéraires.
-Tu n’as pas tort, mon ami aviaire, mais cette année on fête le centenaire du début de cette guerre et les éditeurs ont senti comme une odeur d’argent facile. On se croirait dans les années 50 quand les livres de guerre pullulaient..
-Dis-moi, mon humain préféré : Quand quelqu’un fête la victoire, on oublie que c’est aussi la défaite d’un autre, cet ennemi d’hier devenu l'ami d’aujourd’hui.
- Oui, mais cette année, on ne commémore pas la victoire. On fête le début du massacre.
On commence à célébrer les 9 millions de morts et vingt millions de blessés des quatre prochaines années.
On ne parlera pas d'eux, ils ont tous disparus. On ne parlera pas d'une génération entière gazée, explosée, écrabouillée, enterrée, décapitése poignardée ou, pour les plus chanceux, abattue d’une balle en pleine tête. On ne parlera pas, non plus, de ceux qui furent fusillés.
Les rescapés du massacre, les gueules cassées, avaient survécus par chance et tué par obligation, par devoir et surtout par peur.
D'ailleurs, ils en parlaient peu, comme s’ils avaient honte d’être encore vivants.
Le jour du souvenir, ils ne souhaitaient pas se souvenir. Tu noteras le singulier. Ce n’étaient pas un souvenir qu’ils voulaient oublier, c’était tout un pan de leur vie.
Si certains supportaient leurs corps meurtris, tous souffraient dans leurs âmes en pensant à leurs camarades tombés « au champ d’honneur », « au champs d’horreur »,dans l’inutilité, dans l’anonymat, dans l’oubli.
-Mais faitent-vous la guerre, les z'humains ?
-Pour pas grand chose ! Pour un petit bout de champs, pour une goutte de pétrole, ou pour un Dieu qui, s’il existait, ne permettrait certainement pas qu’on massacre en son nom.
Quand j’étais jeune, enfin... plus jeune, on vivait dans la peur d’un conflit atomique. La peur faisait partie de notre vie quotidienne. On l'ignorait mais elle mangeait à notre table, couchait dans notre lit, dansait à nos bals et jouait à nos jeux.
Depuis quelques jours, certains dirigeants « va-t-en guerre » et gonflés d'orgueil ont envie de recommencer.
-Ils feraient mieux d'imaginer comment sauver la planète d’une destruction économique. » Ajouta z’Hubert dont les aigrettes s’étaient hérissées de colère. « Quand je pense que c’est moi qu’on traite de prédateur ! »
Comme à chacune de ses déceptions, il me tourna le dos.
Pensif et ne trouvant rien à répondre, je me replongeai dans mon bouquin.
*Mon billet est là