Après quelques lectures difficiles, je souhaitais une lecture gaie, enjouée, facile, voir comique. Ce voeu-là n'a pas été exaucé mais ce livre mérite d'être
lu.
L’histoire débute dans une fraisière anglaise au moment où un
entremetteur louche amène Irina une jeune et jolie ukrainienne. Elle y rencontre ses futurs collègues, ramasseurs de fraises, Yola, la chef d’équipe polonaise, frustre et peu farouche, sa nièce
Marta, bigote, moche et célibataire, Chinoise 1 et Chinoise 2, sans nom et interchangeable, Andriy, ancien mineur ukrainien, Tomasz le guitariste polonais qui pue des pieds, Emanuel, un jeune
africain du Malawi. Tous vivent dans deux caravanes stationnées à côté des champs, une pour les femmes et l’autre pour les hommes.
Tout au long du roman, l’auteure nous présente des loosers sans volonté, des anarchistes sans avenir, des vilains, des méchants, des profiteurs, des tricheurs, des
violeurs, des qui puent, des qui bouffent n’importe quoi, des qui pissent n’importe-où, des qui souhaitent baiser n’importe comment.
Le monde anglais que dénonce Marina Lewycka, sur un ton caustique et humoristique, en est un sans loi. Travail au noir, exploitation des émigrés, usines d’élevage,
d’abattage et de mise à la consommation d’aliments pourris et dégueulasses.
J’ai quelques aveux à vous faire. J'ai très rarement rencontré, dans ma vie de lecteur, des écrivains qui m’on fait rire.
Si ce road-book, ce road-trip d’émigrés plus ou moins clandestins en Angleterre, débute assez follement, j’ai ressenti, ensuite, un malaise persistant pendant une
bonne partie de cette lecture et un désintérêt complet pour une fin, style Harlequin, plus amusante.
Et puis tout ne me fait pas rire, et que ce qui me fait rire ne fait pas toujours rire les autres*. Encore plus surprenant, des situations proches peuvent avoir des
résultats complètement opposés. Tout dépend de la manière, du vocabulaire, du talent du conteur et ...de mon humeur.
J’ai quand même apprécié ce roman. Le style est comique, les situations drôles, les aventures bouffonnes et les personnages admirablement campés.
Mais tout ce qui concerne l’exploitation de la misère ne m’a jamais fait sourire, encore moins rire. La cupidité des exploiteurs, l’utilisation d’êtres humains
comme esclaves robotisés ou sexuels, la méchanceté alliée à la bêtise me gênent quand elles ne me font pas horreur.
Comment peut-on utilisé les plus démunis, les plus pauvres, les plus miséreux, les plus affamés, les moins éduqués pour faire de l’argent en les traitant pire que
des animaux, en les faisant travailler comme des esclaves, coucher dans la fange et la merde, manger des saloperies infectes sans parler des harcèlents sexuels.
Dans les films, comme dans les romans, je suis mal à l'aise dès que des personnes innocentes sont maltraitées, bousculées et violentées.
Marina Lewycka dénonce les exploiteurs de la misère, les profiteurs du système et
le fait très bien. Elle ne m’a pas fait rire, elle ne m’a pas donné cette lecture gaie et facile que je souhaitais, mais elle m'a donné de quoi
réfléchir.
Plusieurs blogueurs ont adoré. Leiloona, Cuné et Brigitte ont
trouvé cette histoire sinon hilarante du moins humoristique.
*ouais ** bon *** très bon **** j'aime
par Le Papou
* Et moi, ce n’est rien à côté du compagnon de l’héritière.
Le bémol du Papou :
Je me suis demandé si l’auteur ne se vengeait pas de son statut d’émigrée en Angleterre.